« Il s'exprime bien, ce n'est pas un délinquant »

« Dans votre sac, on a trouvé quelques végétaux. Vous allez dire que c'est du thé, commence le président des comparutions immédiates de Bobigny, incrédule. Puis vous allez vous raviser et dire que c'est de l'herbe congolaise, puis vous allez dire que ce sont des stupéfiants, de la "ganja", mais que ce n'est pas dangereux, donc que vous avez le droit. » En tout, les douaniers de Roissy ont trouvé 26 kg de beuh dans les affaires de Thierry, un noir chauve, la quarantaine finissante, vêtu d'une chemise blanche et d'un veston bleu, qui suit l'exposé depuis le box avec une moue contrariée.

Titulaire d'une carte de résident depuis 20 ans, Thierry vit entre la France et la République du Congo, où il est né. Il prétend y être représentant de son ethnie, dirigeant d'une association de lutte contre la pauvreté, le sida, etc., mais rien n'a pu être vérifié. Il y aurait hérité d'un terrain sur lequel il aurait trouvé le cannabis. Un terrain au sous-sol très riche, d'après ses dires : « Pourquoi avoir eu besoin de cette "ganja" alors que votre terrain regorge d'or, de diamants et de pétrole ? » demande le président. Des investissements à faire pour exploiter son terrain et l'achat d'un tracteur, répond Thierry. C'est pour ça qu'il aurait repris son « activité de dealer » pour lequel il a déjà été condamné deux fois il y a plus de dix ans. « Ce qui est amusant, c'est que vous avez dit aux policiers que vous vouliez favoriser les intérêts de la France », note distraitement le président. Thierry baragouine une réponse : il voulait remercier la France grâce à l'exploitation de son terrain…

La procureur veut quatre ans ferme avec mandat de dépôt et cinq ans d'interdiction de territoire. La douane réclame 114 080 euros. « Ça fait 4 euros le gramme… Pas cher », précise, acide, le président. La défense cherche le sursis avec mise à l'épreuve : « Vous avez à faire à un opportuniste d'occasion, pas un criminel d'habitude. Vous le voyez, il s'exprime bien, ce n'est pas un délinquant. » Thierry demande « une chance de [se] réinsérer dans la société ». Le tribunal le condamne à deux ans ferme avec mandat de dépôt, et 114 080 euros à verser à la douane.

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