Un grand garçon de 35 ans est poursuivi pour violences volontaires, un grand garçon qui vit toujours chez papa-maman aux Gautriats, à Mâcon, dont le casier judiciaire raconte de gros soucis de stupéfiants. Il dit que c'est fini, « je vous jure, madame. » Soit… il n'est pas là pour ça.
Il a porté plainte pour coups et blessures contre un autre grand garçon (qui ne prend pas la peine de se déplacer au tribunal), alors il ne comprend pas qu'il soit aussi poursuivi. « Violences réciproques », dit la présidente du tribunal de police. Elle explique au grand garçon : « En fait, il est interdit de se bagarrer. » Mounir proteste : « C'est plutôt lui qui… » Tss tss tss, la présidente intervient encore : la question n'est pas de savoir si l'un a raison, puisque tous les deux ont tort, au regard des règles qui régissent la vie sociale.
A quoi ressemblent des « violences réciproques » ? Eh bien à des bagarres de cour de récréation, avec des coups plus violents, car à 35 ans on est grand et éventuellement costaud.
Le 5 décembre 2015, Mounir se promène et croise, quelle surprise, son pote Adem, sa casquette vissée sur la tête. Trop drôle, Mounir commence à le taquiner, avec « des jeux de mains ». Puis, encore plus marrant, il lui enlève sa casquette et Adem pète un plomb. D'abord des insultes. « Il m'a insulté de tous les noms, il a insulté ma mère, il a insulté ma grand-mère. » Très vite, les coups. Les deux grands garçons se tiennent par le col, le frère d'Adem arrive par derrière et balaie Mounir, qui tombe. C'est l'hallali : deux jours d'ITT pour Mounir, blessé au front, à la racine du nez, au genou, etc., un jour d'ITT pour Adem, le sensible de la casquette.
Le tribunal repart pour un moment pédagogique car Mounir a du mal à imprimer que sa responsabilité soit aussi engagée : « Madame, je l'aurais cherché, j'aurais pas porté plainte ! »
Ce grand garçon condamné en 2004, en 2010, en 2011 et en 2015 pour des problèmes de stupéfiants, mais aussi d'outrages et de rébellion, ne désespère pas pour autant de la justice, puisqu'il lui demande d'arbitrer. Mais il est déçu d'apprendre qu'à 35 ans, partir en rixe parce qu'on a fait sauter une casquette dûment posée sur un crâne, n'est pas admis non plus par la société.
Le parquet fera tout de même une différence entre ces hommes-enfants, et in fine le tribunal aussi, condamnant Adem à 400 euros d'amende et Mounir à 200 euros. « Je ferai comme s'il n'existait pas quand je le croiserai, c'est la seule solution. J'ai pas compris qu'il le prenne mal. Franchement, pour une casquette… » Le tribunal est bien de cet avis.