Christophe Champenois a un méningiome, une tumeur bénigne qui grossit dans son cerveau et provoque de fréquentes crises d’épilepsie. Vincent Mahé, expert psychiatre, a détaillé cette pathologie à la cour d'assises de Melun. Rapidement, il a conclu : « Il n’y a dans ce méningiome aucun élément en faveur d’un trouble cognitif, qui puisse toucher la mémoire et l’émotion. » Plus tard, il ajoute : « Au contraire, l’épilepsie aurait dû le protéger de cet acte, le rendre incapable de se saisir de Bastien, d’ouvrir le capot de la machine et de l’y enfermer, puis de tourner le bouton. »
Le rapport clinique se poursuit. Où la folie de cet homme se niche-t-elle ? « La pensée n’est pas parasitée par des hallucinations, l’émotion non plus. Le sujet est indemne de toute pathologie mentale aliénante. » La consommation excessive de psychotoxiques, l’alcool et les drogues mêlés aux médicaments ? « Si cette consommation peut induire un effet désinhibant, elle ne peut provoquer une psychose ou un délire. » Le discernement de l'accusé n'était ni altéré, ni aboli. Sa responsabilité pénale est établie.
Christophe Champenois serait un psychopathe. Du moins, il présente les caractéristiques principales qui forment le « noyau » de la psychopathie : « impulsif, réactif depuis l’enfance, qui présente une intolérance majeure aux frustrations et aux contraintes », selon les mots de Vincent Mahé. L’expert insiste sur son « positionnement victimaire, une absence totale de remise en question », couplés à un « égocentrisme majeur ».
Christophe Champenois, le roi domestique
Quelle haine a précipité son bébé dans le tambour de son lave-linge ? La jalousie, peut-être. Vincent Mahé explique : « Le sujet s’est installé dans une position de roi domestique qui confine à l’enfant roi, car combiné avec une grande immaturité. Tous ceux qui contestent cette position sont des ennemis. » Dès sa naissance, Bastien est devenu un rival qui menaçait la place du père roi en son foyer. Les brimades, la maltraitance, et in fine, la mort ont découlé de ces troubles.
C’est l’hypothèse des deux experts, qui l’ont examiné sur une période de 16 mois. Celle de Roland Coutanceau, contre-expert désigné par le défenseur de l’accusé, Me Jean-Christophe Ramadier, ne diffère guère. Le professeur observe « une réticence à l’enfant qui se poursuit au-delà de la naissance. Bastien est quelqu’un qui pose un problème d’autorité, et provoque une espèce de rage » de la part du père.
Christophe Champenois, qui ne se souvient de rien, écoute les rapports sans émotion apparente. Roland Coutanceau n’exclue pas l’amnésie en forme de refoulement d’un acte grave. « Cela évite de se confronter au déroulé de l’acte grave, dans son détail – le diable est dans les détails ! »
« Entre Bastien et le couple, n’a t-elle pas fait un choix ? »
Charlène Cotte lève un peu les yeux, pour une fois, vers le témoin qui s’exprime à la barre. C’est Corinne Descamps, co-auteur du rapport d'expertise avec M. Mahé, qui peint la mère de Bastien en compagne passive, fragile, immature, « qui cherche des arguments pour justifier sa passivité tout en ayant conscience de la gravité des faits ». Finalement, la Charlène Cotte de ce procès, froide et distante des faits, mécanique dans son propos, colle à l’analyse que la neuropsychiatre fait d’elle. Ce n’est pas en sa faveur. Vincent Mahé n'est pas moins sévère lorsqu'il relativise l’emprise que son compagnon avait sur elle : « Il avait un ascendant, mais il y avait un équilibre. Tous les deux trouvaient leur compte. » Charlène Cotte s’épanouit dans sa passivité, auprès de son compagnon tyrannique.
Il y a surtout ce 25 novembre 2011, lorsque son compagnon commet le crime. Le fait qu’elle n’ait pu protéger l’enfant alors qu’elle avait, selon eux, la possibilité d’interférer, laisse les deux experts perplexes. Ils ne semblent pas croire à l'impuissance de la mère face à la folie d’un homme, qui pourrait emporter l'acquittement qu'elle espère. À la barre, Vincent Mahé et Corinne Descamps, à tour de rôle, se confondent en précautions pour préparer l’hypothèse qu’ils risquent à l’aune de l’attitude de Charlène Cotte. « En général, elle est dans un processus de négation des violences pour permettre à son couple de perdurer. Elle se présente en victime de tout mais c’est elle qui prend l’initiative de punir Bastien, c’est elle qui dénonce sa bêtise à son père, alors que la veille elle l'a vu menacer de balancer Bastien du 2e étage. Elle raconte les circonstances de la mort de son fils avec une absence totale d’empathie. Finalement, entre Bastien et le couple, n’a t-elle pas fait un choix ? »